Des producteurs locaux et leurs partenaires construisent un abattoir dont pourront bénéficier les producteurs, les consommateurs et la communauté.
L’Abattoir communautaire de l’île Manitoulin (Manitoulin Island Community Abattoir Inc. (MICA)) est un organisme à but non lucratif constitué en personne morale qui été fondé par des éleveurs de bétail locaux dans le but d’aménager et d’exploiter un abattoir communautaire homologué par le gouvernement provincial. Le projet a été officiellement lancé en 2007 à l’issu d’une journée de réflexion organisée par certaines municipalités et par la Société d’aide au développement des collectivités (SADC) locales. Il a été conclu à la suite de l’exercice qu’un abattoir était nécessaire au développement de l’industrie agricole locale.
Un comité directeur a été créé afin d’étudier le concept et après des mois de travail, le projet a finalement été réalisé. L’ouverture officielle a eu lieu en janvier 2013. Une initiative similaire avait vu le jour en 2003 après la crise de la maladie de la vache folle, mais n’avait pas réussi à aller de l’avant. Le projet d’abattoir communautaire était une priorité, l’abattoir le plus proche étant à Sturgeon Falls, soit à trois à quatre heures de route selon l’endroit où on se trouve sur l’île.
« C’était dispendieux pour les éleveurs, souligne Birgit Martin, présidente de MICA et éleveuse locale de bovins. En plus des longues heures de route, le transport du bétail vers l’abattoir coûtait de 60 à 75 $ pour chaque animal. Le retour sur l’île des carcasses inspectées et réfrigérées coûtait ensuite de 0,15 à 0,18 $/lb. Le marché local de la viande surgelée n’apportait donc aucun revenu supplémentaire aux éleveurs par rapport à celui du boeuf régulier, puisque les frais de transport rongeaient tous les profits. »
La première étape été de réaliser une étude de faisabilité pour la construction d’un abattoir où l’on pourrait à la fois abattre le bétail et congeler la viande. « Il y avait déjà plusieurs transformateurs secondaires dans la région, mais personne n’offrait la possibilité d’abattre les animaux et de congeler les carcasses au même endroit, explique Mme Martin. L’étude de faisabilité a démontré que l’exploitation continue d’un abattoir de ce genre pouvait être rentable, mais qu’il serait nécessaire d’obtenir du financement pour construire le construire. » MICA a donc demandé une subvention au gouvernement provincial pour construire l’installation recommandée en zone verte, avec l’intention de l’exploiter une fois qu’elle serait complétée.
Du développement commercial soutenu par la communauté
MICA, qui est géré par un conseil d’administration bénévole, a pu obtenir 1,5 M $ de financement en provenance de nombreux organismes. La Ontario Cattleman’s Association a assuré le financement initial grâce aux fonds réservés à l’amélioration et à l’expansion des abattoirs en réponse à la crise de la maladie de la vache folle. Une partie du financement a également été assurée par Industrie Canada par l’entremise de FedNor, la Société de gestion du Fonds du patrimoine du Nord de l’Ontario (SGFPNO) et par le ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation et des Affaires rurales de l’Ontario (MAAARO).
« À titre d’organisme à but non lucratif, nous bénéficions également des contributions d’environ 50 membres producteurs de MICA, de plusieurs municipalités de la région et d’un groupe local des Premières Nations, souligne Mme Martin. Nous apprécions aussi énormément l’aide apportée par notre SADC locale, la Société d’aide à l’entreprise de LaCloche Manitoulin (LAMBAC). En plus d’apporter son soutien à la mise en oeuvre ainsi qu’à la gestion des fonds et de nombreux autres programmes, LAMBAC a également fourni au projet une garantie de prêt afin de financer les travaux de construction. Le succès du projet est également dû en grande partie au dévouement des bénévoles locaux. Certains d’entre eux siègent d’ailleurs toujours sur le conseil d’administration.
« Je recommande fortement aux communautés intéressées par ce type de projet de faire la même chose, dit Mme Martin. Nous avons reçu un soutien énorme de la part de la communauté et les consommateurs sont toujours intéressés à consommer des produits locaux. D’un point de vue économique, l’un des plus grands défis a été de concevoir un modèle d’installation servant seulement à abattre le bétail et congeler la viande. Pour des projets d’abattoirs qui combinent les étapes primaires et secondaires de la transformation, cependant, il y a moins de contraintes pour le développement commercial. Une des choses les plus difficiles a été de persévérer : un projet d’une telle envergure prend du temps pour avancer. Il faut solliciter toutes les sources de financement possibles et recevoir toutes les approbations nécessaires. Cela a demandé beaucoup de patience et une bonne communication avec les agences de financement. »
L’abattoir a finalement ouvert ses portes
Les travaux de construction ont été complétés à la fin 2012. Le permis d’exploitation a été délivré le 10 janvier 2013, et l’abattoir a fait son premier essai de fonctionnement le 7 février 2013. On prévoit que l’abattoir atteindra son plein rendement d’ici la fin février et qu’il fonctionnera un jour ou deux par semaine. L’installation est surtout destinée à la transformation du boeuf, mais elle convient aussi pour le porc, le mouton, le bison et le cerf.
Pendant les travaux de construction, MICA a eu la possibilité d’acheter une boucherie locale dont le propriétaire allait prendre sa retraite. « C’était l’occasion parfaite, le moteur dont nous avions besoin pour embaucher un gérant et inciter un nouveau collaborateur à rejoindre notre entreprise, dit Mme Martin. Nous avons embauché un couple qui a emménagé sur l’île Manitoulin pour exploiter le magasin à temps plein et faire fonctionner l’abattoir les jours d’abattage. »
En plus de faciliter la vente directe de produits par les éleveurs, MICA tente de concevoir une marque spécifique à l’île qui devrait être lancée au début de l’été 2013. Mme Martin explique que cette marque établira certains protocoles de production et de transformation afin d’assurer la qualité, l’uniformité et la traçabilité des produits. La marque comprendra des produits de viande locaux provenant d’animaux nourris avec des aliments locaux. Cela facilitera le développement d’une relation directe entre le producteur et le consommateur, tout en créant des opportunités d’affaire pour les épiceries locales et d’ailleurs en région.
« Le projet ne profitera pas seulement aux agriculteurs, mais aussi aux transformateurs, précise Mme Martin. Les exigences réglementaires ont changé au fil du temps et les bouchers locaux ne sont plus autorisés à recevoir des produits du boeuf non inspectés, que ce soit pour la coupe ou pour l’emballage. L’abattoir aidera les transformateurs à faire de meilleures affaires et les producteurs auront la possibilité de commercialiser leurs produits directement auprès des consommateurs. Les consommateurs profitent également du projet puisqu’ils ont maintenant la possibilité de prendre part au mouvement pour l’agriculture locale. »
« Tout ce que nous pouvons faire à titre de producteurs pour faciliter l’achat de produits alimentaires locaux est bon pour nous comme pour le consommateur, souligne Birgit Martin. Tout le monde en profite, du champ à l’assiette. »
Contact :
Birgit Martin
Tél. : 705-282-1334
Courriel : [email protected]